Art & Architecture

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Moïse sauvé des eaux par Hendrick van Balen et Jan Brueghel II, le Jeune.

Plongez dans l'iconographie de l'épisode biblique chez les peintres du Nord.

Présentation de l'oeuvre

Attribué à Hendrick van Balen (1575-1632) et Jan Brueghel II, le Jeune (1601-1678), Moïse sauvé des eaux, première moitié du XVIIe siècle. Huile sur toile, 121 x 154 cm. Château de la Motte-Tilly

© Alain Lonchampt/Centre des Monuments nationaux.

 

L’épisode biblique de la fille de Pharaon découvrant Moïse sur les eaux du Nil est généralement représenté sans aucune allusion réelle à l'Égypte au XVIe siècle. Chez Bonifacio Véronèse (1487-1553) aussi bien que chez Paulo Véronèse (1528-1588), la scène est totalement transposée dans un contexte contemporain du peintre et ne sert que de prétexte à une scène de genre. Seul Nicolo dell'Abate (1510-1571) transpose la scène en contexte grec, mais introduit par le biais des quatre pyramides situées à l’arrière-plan une référence à l’Égypte, même si ces dernières font probablement bien plus référence à la pyramide de Cestius de Rome sur le plan iconographique.

Au XVIIe siècle, la transposition de la scène au sein de l’Antiquité grecque prédomine, même si on y trouve encore des références contemporaines. Les éléments égyptisants tendent à s’affirmer dans le décor architectural essentiellement, où pyramides et obélisques apparaissent. Certains peintres continuent cependant à n'introduire aucun élément évoquant l’Égypte. C’est le cas du tableau conservé au château de la Motte-Tilly proche de l’esthétique flamande tant au regard du chromatisme que du traitement du paysage, où tout est occidental.

L’inscription d’une scène mythologique, historique ou religieuse dans un vaste paysage est caractéristique de la peinture flamande du XVIe siècle avec notamment les peintures de Joachim Patinir (1483-1524). C’est cependant Paul Bril (1553 ? -1626), peintre originaire de Flandres, installé à Rome dès 1582, qui relance la mode pour ce type de production en l’actualisant par un sens accru du réalisme et surtout en donnant plus de monumentalité aux éléments du paysage, s’éloignant ainsi de l’anecdote maniériste. Son atelier romain sert de lieu de rencontre pour de nombreux artistes flamands tel Jan Brueghel l’ancien, dit de Velours, qui rapportèrent ce nouveau type de paysage à leur retour au pays. Destinés à orner les collections des puissants, ces tableaux sont des œuvres de cabinets et sont souvent exécutés par plusieurs artistes, l’un peignant le paysage, l’autre les figures, et parfois même un autre artiste est appelé à peindre les animaux ou les fleurs.

L’œuvre peut être mise en rapport avec une peinture, sur le même sujet, conservée au château de Melford en Angleterre. Cette œuvre, attribuée à Andriaen van Stalbemt (1580-1662) est une variation, sans doute plus tardive, du tableau conservé au château de la Motte-Tilly. Ainsi les deux tableaux offrent une composition très semblable, ne divergeant que par le format et les expressions des personnages. L’œuvre britannique diffère cependant dans le traitement des vêtements, plus détaillés, ainsi que dans le chromatisme froid typique des œuvres flamandes de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle.

La qualité d’exécution des figures ainsi que celle du paysage invitent à penser que deux peintres spécialisés ont collaboré à cette œuvre, l’un pour le paysage, l’autre pour les figures. Ces dernières peuvent être rapprochées du travail d’Hendrick van Balen (1575-1632), peintre formé auprès d’Adam van Noort, Hendrick van Balen devient maître de la guilde de Saint-Luc d’Anvers en 1592. Peintre de scènes mythologiques et bibliques, il se spécialise dans la peinture de figures pour les paysages de ses collègues peintre comme Jan Brueghel I et II, Joos de Momper ou encore Pierre Paul Rubens.

Sa manière de traiter les personnages se caractérise par une grande élégance des attitudes, des couleurs fraîches et la richesse des détails. Le paysage est quant à lui proche de ceux réalisé par Jan Brueghel II dit le jeune. Né en 1601 à Anvers et mort en 1678 dans la même ville, fils aîné de Jan Brueghel I, il est, comme son père, dont il reprend l’atelier, spécialisé dans la réalisation de paysages. Ceux-ci sont souvent caractérisés par l’importance conférée au traitement de la végétation et à la manière dont le feuillage des arbres organise la composition. Cette hypothèse est confirmée par l’œuvre sur cuivre passée en vente publique à New York chez Sotheby’s en 2014, attribuée au cercle de Van Balen et de Brueghel II.

 

Andriaen van Stalbemt (1580-1662), La découverte de Moïse. Huile sur toile, 98 x 126 cm. Sudbury, Melford Hall

© National Trust

 

Cercle d’Hendrick van Balen (1575-1632) et de Jan Brueghel II le jeune (1601-1678), Moïse sauvé des eaux. Huile sur cuivre, 29 x 36.5 cm, New York, Sotheby’s, 05. 06. 2014

© Wikipedia.

 

Jan Brueghel II le Jeune (1601-1678), Allégorie des quatre éléments, vers 1630, huile sur panneau transposé sur toile, 52 x 66 cm, coll. part.

© Web Gallery of Art

 

Hendrick van Balen (1575-1632) et de Jan Brueghel II le jeune (1601-1678), Vierge à l’Enfant avec saint Jean-Baptiste et de anges, 1626. Huile sur bois, 55 x 78 cm, coll. part.

© Web gallery of art

Oeuvre à la loupe

Autrice de la notice

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Morwena Joly-Parvex

Conservatrice du patrimoine

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Chef-d'œuvre de Brueghel