Histoire

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Femmes bâtisseuses

Gisant de Marguerite d'Autriche au monastère de Brou

Au Moyen Âge et plus encore à la Renaissance, de nombreuses femmes de pouvoir ont « apporté leur pierre » à l’édification de nos monuments. En voici quelques exemples…

Blanche de Castille

La reine Blanche de Castille (1188 - 1252), qui assure la régence du royaume de France pendant la minorité de son fils Louis IX (futur saint Louis), ordonne dans les années 1230 l'édification d’un gigantesque château fort à Angers

Son but ? Protéger l’Anjou, nouvelle frontière du royaume de France depuis qu'Angers y a été rattaché en 1206. 

Avec ses 17 tours, ses fossés et ses éléments défensifs ingénieux, la forteresse de Blanche de Castille est alors la plus puissante de France. 

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Porte des champs du château d'Angers vue depuis l'extérieur
Porte des champs du château d'Angers

© Romain Veillon / Centre des monuments nationaux

Marguerite d'Autriche

Marguerite d'Autriche (1480 - 1530) est une femme puissante : fille de l’empereur du Saint-Empire romain germanique Maximilien Ier et de Marie de Bourgogne, tante de Charles Quint, elle deviendra régente des Pays-Bas à partir de 1507. 

Passionnée d'art, c’est aussi l’une des plus grandes mécènes et collectionneuses de son temps.

Lorsqu’elle perd son époux bien-aimé, Philibert le Beau, en 1504, elle décide d’ériger en son honneur un remarquable mausolée : le monastère royal de Brou à Bourg-en-Bresse. 

Il devra abriter trois somptueux tombeaux : un pour Philibert, un pour la mère de celui-ci, et un pour Marguerite elle-même.

Dirigeant les travaux depuis Malines (actuelle Belgique), Marguerite d’Autriche consacre une grande partie de sa fortune à la construction de l’édifice. Elle souhaite ce qu’il y a de mieux : artistes, artisans et matériaux viennent de toute l’Europe !

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Photo du Gisant du tombeau de Marguerite d’Autriche, dans l’église du monastère royal de Brou
Gisant du tombeau de Marguerite d’Autriche, dans l’église du monastère royal de Brou

© Franck Paubel

Jeanne de Balsac

Le château de Montal, dans le Lot, doit sa construction à une femme de caractère : Jeanne de Balsac. 

Fille de Robert de Balsac, connu pour sa participation aux guerres d’Italie, Jeanne est éduquée dans la pensée humaniste

À la mort de son époux Amaury en 1510, elle se retrouve seule avec cinq enfants et obtient le droit de les élever seule. 

Elle fait alors bâtir le château de Montal, qui s’inspire des modèles italiens. Les décors raffinés empruntés à l’Antiquité traduisent sa grande culture, mais aussi son histoire familiale. 

Les portraits de ses proches, vivants ou disparus, sont ainsi sculptés sur les façades de la cour intérieure. On y trouve aussi un message récurrent, « Plus d’espoir », qui exprime sa douleur de veuve et de mère meurtrie par la perte de son fils aîné, Robert de Montal.

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Buste de Jeanne de Balsac sculpté sur la façade sud-est du château de Montal
Buste de Jeanne de Balsac sculpté sur la façade sud-est du château de Montal

© David Bordes / Centre des monuments nationaux

Catherine de Médicis

Régente de 1560 à 1563, Catherine de Médicis (1519 - 1589) conserve, sous le règne de ses fils Charles IX et Henri II, une grande influence

Héritière des goûts des Médicis pour les arts, elle met en place une politique de constructions et de transformations architecturales. Elle fait notamment édifier le palais des Tuileries, non loin du Louvre, et agrandir le château de Chenonceau

Mais son plus grand chantier est celui du somptueux mausolée des Valois à Saint-Denis, destiné à devenir leur sépulture dynastique. Ce bâtiment qui jouxte la basilique Saint-Denis s'inspire de la forme ronde des temples de l'Italie antique, ce qui lui vaut le surnom de « rotonde des Valois »

Édifice inachevé, il sera détruit en 1719 car il menaçait de s’effondrer… Seul le majestueux tombeau d’Henri II et de Catherine de Médicis sera conservé et remonté au sein de la basilique Saint-Denis.

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Basilique de Saint-Denis, reconstitution de la rotonde des Valois
Basilique de Saint-Denis, reconstitution de la rotonde des Valois

© Art Graphique et Patrimoine / Centre des monuments nationaux

Des femmes sur les chantiers ?

La contribution des femmes dans le domaine de la construction ne se limite pas à leur rôle de mécènes et commanditaires !

La main-d’œuvre féminine est également un rouage essentiel sur les grands chantiers, et ce depuis des siècles. 

Au Moyen Âge, des femmes bâtisseuses prennent en charge toutes sortes de travaux, des plus délicats (ornementation, peinture, broderie…) aux plus « physiques » (transport et taille des pierres, brassage de la chaux, fabrication du mortier, tressage des cordes…), comme l’explique la médiéviste Sandrine Victor.

Ces femmes ont souvent un lien familial (épouse, sœur, fille…) avec un ouvrier du bâtiment, même si certaines d’entre elles parviennent à mener leur activité professionnelle de façon autonome

Généralement moins bien payées que les hommes (même si les variations de salaires sont multifactorielles : tâches réalisées, force, qualification…), certaines obtiennent cependant une relative parité.

Mais à partir du XIVe siècle, les maîtres compagnons vont peu à peu exclure les femmes des chantiers, alors que prend fin le « temps des cathédrales » et que le travail se raréfie...


Sources : 

Chantier de la cathédrale d'Amiens
Chantier de la cathédrale d'Amiens

© Reproduction Thomas Thibaut / CMN

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